Les Dents de la mer (Jaws)

Film horreur, suspense de Steven Speilberg avec Roy Scheider, Robert Shaw, Richard Dreyfuss, Lorraine Gary, Murray Hamilton.

Scénario : Peter Benchley, Carl Gottlieb.

États-Unis, 1975 - 2h04.

L'histoire

Un requin isolé attaque les baigneurs lors du début de la saison estivale d’une petite station balnéaire d’Amity. Le chef de la police, Martin Brody (Roy Scheider), est certain que ces attaques sont dues à un requin et met tout en place pour interdire l’accès des plages, mais le maire de la ville, Larry Vaughn (Murray Hamilton) en décide autrement et laisse les plages ouvertes...

La bande-annonce du film

Qui est le réalisateur de ce film ?

C’est Steven Speilberg. En 1975, Spielberg a à son actif deux courts-métrages et deux longs-métrages (Firelight en 1964 et Sugarland Express en 1974), c’est encore un jeune réalisateur. Grâce au film, Les Dents de la mer, Spielberg obtient une reconnaissance internationale. Le film est à la fois un succès commercial et critique dans le monde entier.

Le roman

Les Dents de la mer est l’adaptation du roman de Peter Benchley (1940 – 2006), le livre est publié en 1974. Benchley s’intéressait beaucoup au monde de la mer et il a eu l’idée d’écrire un roman à la suite des faits divers, des attaques de requins dans le New Jersey en 1916. Une série d’attaque de requins qui se déroula du 1er juillet au 12 juillet 1916. Les Dents de la mer reprend donc ces événements pour la trame de son histoire.

Analyse des personnages

Le chef Brody (Roy Scheider) : Après avoir passé une partie de sa carrière dans les rues mouvementées de New-York, Martin Brody et sa famille viennent s’établir dans la paisible île d’Amity. Il est nommé comme nouveau chef de la police locale. Après les attaques de requins, Brody subira l’hostilité du maire Larry Vaughn (Murray Hamilton) et du conseil municipal. Le chef Brody sait pertinemment que les attaques sont liées à un requin, pour lui, il faut fermer les plages. Tout d’abord intrigué et stressé par ces attaques de requin à répétition, Brody finira par se renseigner sur la véritable nature des requins, notamment en lisant des livres sur le sujet, et finalement fera appel à un spécialiste, Matt Hooper (Richard Dreyfuss). L’Océanologue confirmera la thèse de Brody, les attaques viennent bien d’un requin, mais un requin hors norme, à la taille gigantesque. Le chef Brody est déterminé, courageux et il comprendra qu’il doit partir chasser le requin sur son territoire en pleine mer. Pour cela, il partira sur le bateau de Bart Quint, accompagné de Hooper.

Le maire de la ville Larry Vaughn (Murray Hamilton) : Le chef Brody et lui s’opposent directement. L’un veut fermer les plages, l’autre les laisser ouvertes. Le chef Brody pense avant tout à la sécurité des baigneurs. Le maire pense à l’activité économie de l’île. En effet, un afflux de touristes pour le 4 juillet (fête de l’indépendance au États-Unis) marquera la saison pleine. Le maire est donc confronté à une future perte économie pour sa ville, et en même temps, il doit agir rapidement pour faire cesser les attaques du requin. Finalement, Larry Vaughn va engager Bart Quint, le chasseur de requin, pour mettre un terme à son problème.

Le scientifique spécialisé dans les requins Matt Hooper (Richard Dreyfuss) : L’Océanologue débarque sur l’île, après avoir été contacté par le chef Brody pour lui venir en aide. Autour de deux bouteilles de vin, les deux hommes, Brody et Hooper, sympathisent et décident d’enquêter. Ils finiront par découvrir que le requin en question est d’une taille gigantesque, et le seul moyen de l’anéantir est de le chasser sur son territoire.

Le chasseur de requin Bart Quint (Robert Shaw) : Bart Quint est le chasseur de requin bourru, qui pense être l’homme de la situation pour mettre fin aux attaques. Il est finalement engagé par le maire. Par la suite, Quint fait la connaissance de Brody et Hooper. Il respecte l’autorité du chef Brody, mais prend de haut le scientifique Hooper. Il le trouve un peu jeune et sans expérience, Quint essaie de le tester, mais contre toute attente Hooper ne se laisse pas impressionner. Les trois hommes embarquent alors sur l’Orca pour chasser l’animal. Une fois en mer, Quint et Hooper sympathisent en se racontant leurs différentes aventures avec les requins. Malheureusement, Quint finira dévoré par le requin.

Analyse de la scène sur la plage

Nous sommes au début du film, quelques jours après l’attaque d’un requin sur une jeune femme. Le chef Brody veut immédiatement fermé les plages afin d’éviter de nouvelles attaques et d’autres victimes, mais il est obligé de céder à la pression du maire et du conseil municipal. On se retrouve sur une plage où la plupart des gens présents n’osent pas se baigner, pourtant quelques personnes téméraires s’aventurent dans l’eau. Le chef Brody est assis sur une chaise pliante, un peu en retrait, très nerveux et scrutant avec attention l’horizon. Très concentré à détecter le moindre signe alarmant.


La scène de la plage débute avec un plan en travelling vers la gauche où l’on suit une femme forte se dirigeant dans l’eau. On voit également en arrière plan un jeune homme qui joue avec son chien. La femme forte sort du plan, et l’on suit un jeune garçon avec un plan en travelling vers la droite. Il vient de se baigner et se dirige vers sa mère, pour lui demander quelque chose. Un calme apparent s’est installé sur la plage. Les seuls bruits entendus sont ceux des discussions mêlées, d’une petite musique de fond provenant d’une radio, et les clapotis de la mer. Dès les premières minutes de cette séquence, la caméra montre au spectateur trois personnages, passant de l’un à l’autre, et oblige le spectateur à se demander qui sera la prochaine victime. Ce plan séquence qui suit le jeune garçon permet de découvrir le chef Brody. Le spectateur comprend alors que le chef Brody, en vue de profil, est plutôt inquiet et soucieux. Brody voulait fermer les plages, justifiant le fait que de laisser les plages ouvertes offrirait un « buffet » au requin, mais Brody cède à la pression exercée par le maire. Encore une fois en arrière plan, plusieurs personnages dont la femme de Brody discutent sans stress particulier, ce qui contraste nettement avec l’attitude anxieuse du chef Brody. Cette anxiété est palpable et se reporte invariablement sur le spectateur.

Première coupe de cette scène avec un plan large sur la mer, la femme forte du début flotte dans l’eau, elle apparaît comme une proie pour le requin dans le vaste océan. C’est également un plan subjectif, le spectateur se retrouve à la place du personnage principal le chef Brody. La dominance de la mer est très nette sur la plage. Le jeune homme avec son chien réapparaissent dans le champ, ils continuent à jouer sur la plage, en un travelling vers la droite. Le chien saute dans l’eau et se dirige vers un couple qui s’amuse. Le plan suivant montre le jeune garçon qui court avec son matelas pneumatique, repasse devant sa mère qui le suit des yeux, pour sauter dans l’eau. Un nouveau plan sur le chien de tout à l’heure, qui est rejoint par son maître, puis de nouveau sur la femme forte et enfin sur le jeune garçon toujours à nager sur son matelas pneumatique. Ces différents plans permettent de créer une certaine tension. Le spectateur peut s’attendre à une prochaine attaque du requin.

Un autre plan sur le jeune homme et son chien, cette fois-ci, le chien est sur la plage. Le chien court et rejoint une nouvelle fois l’eau pour récupérer son bâton, jeté auparavant par son maître. Les plans suivants renforcent encore plus l’inquiétude du chef Brody. Le passage d’un figurant (« raccord masque »), une fois à droite puis à gauche sert de coupe avec l’ajout d’un zoom. Gros plan sur le chef Brody, il est seul, obnubilé par la peur de voir resurgir le requin et d’une nouvelle attaque. Puis on revient sur le plan de la femme forte, toujours coupé par le passage de personne (vers la gauche, vers la droite, puis deux fois à gauche) devant le champ. Une première frayeur pour le chef Brody, il aperçoit quelque chose nager rapidement vers la femme forte, mais c’est un vieil homme qui nage sous l’eau. Avec ces quelques plans, la tension monte d’un cran pour retomber presque instantanément.

Un homme se dirige vers le chef Brody pour lui parler. Complètement absorbé et sans vraiment prêter attention aux paroles de l’homme, le chef Brody ne peut s’empêcher de détourner la tête pour observer la mer et les nageurs. Le plan suivant est divisé en deux, c’est un plan subjectif en split screen (le plan est coupé en deux), le spectateur se retrouve du point de vue du chef Brody. On voit sur le côté droit la tête de l’homme et de l’autre côté une autre tête dépassant de l’eau. Le chef Brody ne peut s’empêcher de surveiller la mer. Un cri retentit, aussitôt le chef Brody bondit de sa chaise. Mais ce n’est qu’un couple qui s’amuse dans l’eau. Ici, Spielberg surprend une nouvelle fois le spectateur et celui-ci pourrait croire à l’attaque du requin.

D’un coup, tous les enfants qui étaient restés campés sur la plage, se jettent à l’eau. Peut-être rassurés du fait que rien de particulier ne se passe. Ici encore, Spielberg joue avec les nerfs des spectateurs, la tension baisse d’un cran soulignée par le fait que les gens sur la plage commencent à se détendre. Une nouvelle fois un autre personnage vient à la rencontre du chef Brody, interrompant sa surveillance, c’est le vieil homme qui nageait tout à l’heure, Brody l’avait pris pour le requin. Il lui parle en lui faisant comprendre que tout le monde a compris pourquoi le chef Brody ne va pas dans l’eau. La réaction de Brody est épidermique et rembarre le vieil homme. Un plan très furtif sur les enfants du chef Brody. Sa femme vient vers lui pour essayer de le détendre. Le chef Brody relâche temporairement la pression, alors que l’attaque du requin va intervenir d’ici peu.

Les enfants batifolent dans l’eau, s’agitant frénétiquement, quelques cris se font entendre. Le spectateur peut encore une fois penser à l’attaque du requin, mais cela est confirmé par le plan suivant, le requin est bien présent dans l’eau. Le jeune homme au chien le cherche désespérément au bord de la plage. Et pour confirmer cette affirmation, un plan sur le bâton flottant à la surface de l’eau. Ce plan n’était peut-être pas nécessaire, mais renforce le fait que le requin est bien là. Un plan sous eau, en vue subjective du requin, on entend alors la musique de John Williams, elle s’intensifie au fur et à mesure que le requin s’approche de sa proie. Ce que l’on pressentait depuis le début de la scène se produit. Le jeune garçon se fait attaquer par le requin. Le plan qui suit, le fameux travelling compensé montre le chef Brody décontenancé et renforce l’effet de surprise et de terreur à cet instant.

La fin de la scène se termine sur le matelas déchiqueté du garçon.

En conclusion

Spielberg a réussi avec ce film, Les Dents de la mer, à rendre les spectateurs sujets à l’aquaphobie et surtout de faire passer les requins pour de véritables tueurs d’homme. C’est un film que j’aime beaucoup, j’ai dû le voir plus d’une dizaine de fois et l’effet est toujours le même. Se retrouver perdu en mer, sur le territoire des requins, l’homme n’a aucune chance de survie a priori et Les Dents de la mer reste une pure fiction. Ce film a fait beaucoup de tort aux requins dans l’esprit collectif. La plupart des gens prennent, désormais, le requin comme un tueur sanguinaire, friand de chair humaine. Un requin peut attaquer un homme, mais son régime alimentaire se base plutôt sur des animaux comme des lions de mer ou autres otaries. À la fin du film où le requin s’en prend simultanément aux trois protagonistes avant que leur bateau ne coule. C’est bien évidemment ici du domaine du non-sens, Splieberg fait de l’anthropomorphisme avec son grand requin blanc. Les suites des Dents de la mer, navrantes et sans intérêt, reprendront encore plus cette caractéristique du comportement humain. Une de ces suites s’appelle d’ailleurs, la pire de toute en passant, La Revanche. Le requin traque le personnage d’Ellen Brody (la femme du chef Brody) et veut se venger.