Il était une fois en Amérique de Sergio Leone avec Robert De Niro, James Woods, Elizabeth McGovern.
Scénario : Sergio Leone, Piero De Bernardi, Enrico Medioli, Franco Arcalli, Franco Ferrini, Leonardo Benvenuti.
Italie, Etats-Unis 1984 - 221 minutes.
Il était une fois en Amérique raconte l’ascension, depuis l’enfance, d’un groupe d’amis, des petits gangsters juifs du quartier de Lower East Side. De l’amitié à la trahison, la fresque s’articule sur plusieurs époques, de 1922 à 1968…
Sergio Leone est né à Rome le 3 janvier 1929 et mort le 30 avril 1989 dans la même ville, dans une famille déjà enracinée dans le cinéma : son père, Roberto Roberti, était un réalisateur du cinéma muet, et sa mère, Bice Valerian, une actrice. Très tôt, Leone est immergé dans le monde du septième art. Il commence sa carrière dans les coulisses du cinéma italien de l’après-guerre, d’abord comme assistant réalisateur, puis comme scénariste pour des péplums et des films d'aventure.
Il connaît la célébrité avec Pour une poignée de dollars (1964), premier volet de sa célèbre « trilogie du dollar », qui comprend également Et pour quelques dollars de plus (1965) et Le Bon, la Brute et le Truand (1966). Ces films, marqués par le style visuel unique de Leone, l'utilisation du gros plan, les silences tendus, et les musiques emblématiques d'Ennio Morricone, révolutionnent le western.
En 1968, il signe Il était une fois dans l’Ouest, un chef-d'œuvre du genre, suivi par Il était une fois la révolution (1971), un film plus politique. Après une longue pause, il revient en 1984 avec Il était une fois en Amérique.
À la suite de la Trilogie du dollar (Pour une poignée de dollars, Et pour quelques dollars de plus et Le Bon, la Brute et le Truand), Sergio Leone souhaite s’éloigner du genre western. Ayant depuis quelque temps l’ambition de réaliser une œuvre majeure sur le gangstérisme américain des années 1930, il envisage alors la création de Il était une fois en Amérique.
Sergio Leone a découvert le roman The Hoods sur la recommandation de Giuseppe Colizzi, lors du montage du film Le Bon, la brute et le truand. L’ouvrage est écrit par Harry Grey, pseudonyme de Harry Goldberg. Ce livre, qui retrace la vie de son auteur durant l’époque de la prohibition, repose sur l’expérience authentique de Grey en tant qu’ancien gangster.
Leone est en contact avec United Artists pour son projet. Toutefois, le coût élevé du film inquiète les producteurs américains. Ces derniers proposent à Sergio Leone de reporter la production du film s’il accepte de réaliser un autre western auparavant (Il était une fois dans l'Ouest). Leone accepte sous réserve d’obtenir une liberté totale. Par la suite, il met fin à la collaboration avec la maison de production en raison de désaccords sur le choix des acteurs principaux, alors que Leone souhaitait engager Henry Fonda et Charles Bronson. Finalement, c’est la Paramount qui produit le film. Elle accepte le casting et laisse carte blanche pour le scénario et la réalisation.
La première difficulté est survenue lorsque Sergio Leone a entrepris d'acquérir les droits du livre. Ceux-ci avaient déjà été obtenus par un réalisateur américain, Dan Curtis. Il a donc fallu plus de trois ans de négociations au producteur Alberto Grimaldi, représentant Sergio Leone, pour parvenir à un accord. En contrepartie, Grimaldi s'engageait à produire un film pour ce réalisateur. Cependant, en raison de problèmes rencontrés lors de la production du Casanova de Fellini et d'un échec financier avec 1900 de Bertolucci, Grimaldi a décidé d'abandonner le projet. Après deux années supplémentaires, Arnon Milchan a repris les discussions et, un an et demi plus tard, a pu finalement racheter les droits à Grimaldi.
Des changements importants ont eu lieu lors de l'écriture du scénario. Franco Arcalli, monteur et scénariste du Dernier tango à Paris, avait entamé le travail avant son décès en 1978. Sergio Leone s’est alors tourné vers Leonardo Benvenuti, Piero De Bernardi et Enrico Medioli pour continuer le scénario. L'équipe a repris le projet depuis le début. Une version initiale prévoyait une histoire très longue, envisagée soit comme deux films distincts, soit comme un seul film d'environ quatre heures et demie. Bien que les producteurs américains aient accepté le principe d'une sortie en deux parties, la loi imposait un délai de trois mois minimum entre les deux sorties. En conséquence, Sergio Leone a réduit la durée du film.
Avant la fin du tournage, Sergio Leone a rencontré plusieurs difficultés : épuisement du réalisateur (problème cardiaque) entraînant une interruption, dépassement de budget, conflits avec les syndicats américains et désaccords avec le producteur et la Warner sur la durée du film.
Après plus de dix ans d’attente, le projet de réalisation du film Il était une fois en Amérique se concrétise, grâce au producteur Arnon Milchan et à la participation de Robert De Niro dans le rôle principal. Le tournage commence le 14 juin 1982 et s’achève le 22 avril 1983.
Sergio Leone a été accusé de ne pas respecter le contrat initial prévoyant une durée de 165 minutes. Les exploitants ont exigé que le film soit réduit de deux heures et dans une chronologie linéaire.
Pour la première au Festival de Cannes en 1984, Leone présente une version de 229 minutes (3h49), qu’il considère comme la plus proche de sa vision. C’est cette version qui sera montrée dans la plupart des pays européens, et qui permet de comprendre pleinement la richesse thématique et la structure narrative complexe du film.
Aux États-Unis, les producteurs (Warner Bros. et The Ladd Company) ne croient pas qu’un film aussi long, et surtout aussi elliptique dans sa narration, puisse trouver son public. Contre la volonté de Leone, ils décident de remonter le film eux-mêmes, en réduisant sa durée à 139 minutes (2h19).
Mais surtout, ils réorganisent les scènes de façon chronologique, supprimant les jeux de temporalité et de mémoire voulus par Leone. Ce montage linéaire brise complètement la logique poétique et émotionnelle du film, le rendant confus, incohérent, voire plat.
Le résultat est un échec critique et commercial aux États-Unis. Leone, profondément blessé, considérera cela comme une trahison artistique. Il ne réalisera plus jamais de film après cette expérience.
Il faut attendre les années 2000 pour que Il était une fois en Amérique soit enfin réhabilité. Une version restaurée de 251 minutes (plus de 4h), présentée à Cannes en 2012, permet de retrouver une large part du film tel que Leone l’avait imaginé. Ce travail a été mené grâce à la Cinémathèque de Bologne et à la famille Leone, bien que quelques minutes soient toujours manquantes.
Source : Sergio Leone Il Rivoluzionario de Jean-François Giré – Volume 2 : l’Amérique.